Le Temple de la Gloire est l’unique opéra sur un livret de Voltaire à avoir été représenté au xviiie siècle, à Versailles devant la cour puis à l’Opéra de Paris. Le philosophe détourne la commande qui lui a été faite – célébrer la victoire militaire de Louis XV à Fontenoy (1745) : il transforme le temple de la Gloire en celui du Bonheur public. Il veut réformer l’opéra français : moins d’amour, plus de spectacle. Rameau le seconde brillamment et, doté d’un orchestre important compose certains de ses morceaux les plus originaux et les plus puissants, quitte à réintroduire, dans la seconde version de 1746 pour le public parisien, un peu d’amour et de lyrisme.
Mais oui, Voltaire et Rameau ont collaboré sur plusieurs ouvrages lyriques ! Un – mille fois hélas – perdu Samson et Dalila, une comédie-ballet La Princesse de Navarre, ainsi que le présent Temple de la Gloire, représenté lors de deux fêtes royales à Versailles fin 1745, puis repris à l’Opéra de Paris dans la foulée. À la différence de la Cour, le public parisien fit un mauvais accueil à l’ouvrage (trop allégorique et moral, semble-t-il !), de sorte que Rameau le remania très largement pour une reprise en 1746. C’est cette version définitive, plus ou moins jamais entendue depuis le XVIIIe siècle, qu’a décidé d’enregistrer l’ensemble Les Agrémens dirigé par Guy van Waas. On y découvre un Rameau royal, très « français », plus aristocratique sans doute que dans ses œuvres lyriques plus connues de nos jours. Voilà une superbe réalisation qui souligne l’importance de la coopération entre deux des plus grands esprits de leur temps, Rameau et Voltaire.