Théodore Dubois : Le Paradis Perdu
Le Paradis perdu
Théodore Dubois (1837-1924)
Dans l’instrumentation originale d’après le manuscrit autographe de Théodore Dubois
Drame-oratorio en quatre parties créé en 1878
Livret d’Edouard Blau d’après le poème de John Milton
Direction musicale, Jean Claude Malgoire
Conception visuelle et scénographie, Jacky Lautem
Ève - Magali Simard-Galdès, soprano
Adam - Antonio Figueroa, ténor
Satan - Marc Boucher, baryton
L’Archange - Mireille Lebel, mezzo-soprano
Uriel, le fils - Denis Mignien, ténor
Molock - Philippe Favette
Belial - Kamil Ben Hsain Lachiri
Choeur de chambre de Namur
Préparation du choeur, Thibaut Lenaerts
La Grande Écurie et la Chambre du Roy
Coproduction avec le Festival Classica de Saint Lambert (Canada)
John Milton - Un poète biblique
L’ombre de John Milton (1608-1674), un peu oublié de nos jours, plane sur le programme de la saison 2017-2018 de l’Atelier Lyrique. En effet sans ce grand poète anglais du xvie siècle, auteur de Paradise Lost (Le Paradis perdu, 1667), La Création de Haydn n’aurait peut être pas vu le jour, ni Le Paradis perdu de Théodore Dubois. Ces deux oeuvres, deux oratorios, sont directement inspirées de John Milton. Ce dernier dès sa jeunesse, songeait à un poème qui perpétuerait son nom. Milton appartient à la Renaissance par son immense curiosité intellectuelle, à la Réforme par l’idée qui a dirigé toute sa vie : justifier les voies de Dieu envers les hommes, c’est un puritain humaniste et républicain, un dissident hostile aux églises catholique, anglicane et calviniste. La théologie de Milton repose sur le libre arbitre de l’homme et la miséricorde de Dieu, sur les mérites de Jésus-Christ reconnus par la foi et la charité de l’homme. Dans la pratique du culte, Milton ne croit pas aux sacrements. C’est aussi un sensuel, adorateur du corps féminin mais corrigeant sa sensualité par la tempérance. Voltaire dira de lui : « Dans tous les autres poèmes, l’amour est regardé comme une faiblesse ; dans Milton seul, il est une vertu et comme il n’y a point d’exemple d’un pareil amour, il n’y en a point d’une pareille poésie. » Au xviiie siècle en France, la renommée du poète fut considérable, six traductions de Paradise Lost paraissent, suivies en 1836 de celle de Chateaubriand. On a dit à juste titre de cette oeuvre qu’il s’agissait d’une tragédie cosmique où le personnage central n’est plus Adam mais Satan, une apologie de la révolte annonçant le satanisme romantique. Malgré sa complète cécité à partir de 1652 et la mort de sa femme, Milton réussit à publier en 1667 la première version divisée en dix livres de Paradise Lost, il dictait les textes à ses filles ou à des amis proches. Une seconde édition en douze livres sera publiée en juillet 1674, quelques mois avant sa mort.
Le poème biblique de John Milton publié en dix chants en 1667 et en douze en 1764, a sans doute été inspiré par la représentation à Rome du Mystère de la désobéissance d’Adam et Ève, il fut conçu d’abord sous la forme d’une tragédie. L’épopée ne suit pas une progression chronologique : dans les livres I et II les anges révoltés sont jetés dans un enfer qui rappelle les évocations fantastiques de Bruegel, alors que la rébellion initiale de ses anges contre Dieu est exposée dans le livre III. Satan rôde autour de l’éden (livre IV) mais la création d’Adam et Ève n’a pas lieu avant le V. Le livre IX décrit la tentation où Satan s’adresse à Ève comme un courtisan du XVIIe siècle à sa maîtresse. Enfin c’est dans le livre III que la présentation du fils de Dieu aux anges provoque la rébellion de Lucifer.
À partir du Paradis perdu, Théodore Dubois réalisa un drame-oratorio en quatre parties composé en 1878. Après l’écrasement de la Commune, et alors que la première pierre de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre venait d’être posée et que le gouvernement conservateur imposait une politique d’Ordre moral, la Ville de Paris avait lançé un concours de musique sacrée qui fut remporté par Théodore Dubois pour Le Paradis Perdu et Benjamin Godard pour Le Tasse. L’oeuvre de Dubois, écrite pour 4 solistes, choeur et orchestre, sur un livret d’Édouard Blau (d’après le poème de John Milton), influencée en particulier par Berlioz et Gounod, fut créée au Théâtre du Châtelet en 1878 et remporta un vif succès. Le 3 Juillet 1913, lors d’un concert au Trocadéro Le Paradis perdu de Théodore Dubois fut très applaudi et le compositeur, présent, reçut une longue et chaleureuse ovation, les deux dernières parties de l’oratorio ont pour titres : La Tentation et Le Jugement dernier.